Une vaste réserve foncière.
La construction d'une nouvelle prison à partir de 1938 au nord-est de la ville avait, dès l'entre-deux-guerres, lancé le débat relatif à l'utilisation des terrains de l'ancienne prison. Après les destructions de 1940, ce vaste espace situé au sud-ouest immédiat du palais de justice, fut donc intégré au plan de reconstruction et d'aménagement en tant que terrain de compensation. L'administration appela "îlot B" la vaste réserve foncière constituée du terrain de l'ancienne prison et de celui d'une propriété privée, la propriété Rétif, dont l'expropriation fut prévue d'emblée. Cet espace comprenait des vestiges des anciennes fortifications de la ville : tours, murs et fossés dont la commission des sites et monuments de Loir-et-Cher demanda le classement en octobre 1941. Ses qualités - vaste, central, arboré - justifient les discussions et les tâtonnements que suscitèrent les questions de son affectation et de sa desserte.
Poursuivre les aménagements du XIXe siècle.
La direction qui fut prise tout d'abord s'inscrivait dans la lignée des travaux de la municipalité d'Eugène Riffault dans la seconde moitié du XIXe siècle. L'érudit blésois Hubert-Fillay l'avait appelée de ses vœux dans un article publié dans la Dépêche dès l'été 1940, puis dans Le Jardin de la France. L'architecte Charles Nicod proposa donc dès le printemps 1941 de prolonger la grande perspective de la rue Denis-Papin, au-delà de l'escalier monumental, comme cela avait été voté par le Conseil Municipal en 1855, à ceci près qu'il la faisait aboutir rue d'Angleterre et non rue du Bourg-Neuf. Elle s'accompagnait du percement de deux voies la croisant : l'une dans l'axe de la rue Gallois l'autre dans celui de la rue Guerry. Sa première idée fut que ces terrains soient affectés à l'implantation d'un nouvel hôtel des postes. Il suggérait en outre que des logements soient construits sur le terrain Rétif, considérant que les beaux arbres de cette propriété pourraient agrémenter une zone d'habitations de luxe.
Un îlot intégré au projet de concentration des services administratifs en ville haute.
Le plan finalement proposé en 1942 intégrait une autre répartition des équipements dans la ville. La municipalité tenait en effet à ce que la poste soit implantée à la place de l'ancien collège jésuite, choix qui avait été validé avant-guerre au terme de longues négociations entre la Ville, l'administration des PTT et celle des monuments historiques. L'architecte reprit donc à son compte la proposition d'Hubert-Fillay : dans une logique de concentration des activités, il proposa, comme l'érudit blésois, d'y construire un centre administratif, la construction de logements restant au programme.
Afin de préciser cette intention, Louis Arretche fut chargé en 1942 d'une étude spéciale d'architecture pour l'installation d'un quartier administratif dans l'îlot B. Étudiant parallèlement l'aménagement du terrain du Carmel, et notamment le percement d'une voie reliant la place de la République au nouvel hôtel de ville, l'architecte bénéficiait d'une vision globale de l'organisation nouvelle de la ville haute, avec la concentration des services administratifs et les circulations à imaginer entre eux. Son projet, présenté en mai 1943, prévoyait l'installation sur l'ancienne propriété Rétif, à l'arrière du palais de Justice, de la direction des Contributions et de l'hôtel des Ponts et Chaussées dans quatre bâtiments disposés autour d'un jardin. Les immeubles de logement devaient finalement être construits le long de la rue Guerry prolongée. Les anciens remparts de la ville, murs et tours, ainsi que la salle et les escaliers des Cordeliers, étaient préservés et il s'appliqua à souligner leurs qualités pittoresques dans des croquis. Cependant, lors de l'adoption de ce plan en mai 1942, le Conseil municipal formula le vœu que les vestiges du couvent des Cordeliers, qu'il considérait comme dénué d'un quelconque intérêt archéologique, soient détruits.
Après-guerre : un programme remanié et une lente construction.
La reconstruction de cet îlot après la guerre connut de multiples vicissitudes qui retardèrent sa réalisation. Il fut en particulier retardé par les valses-hésitations relatives à l'implantation des équipements publics de la ville. Un changement bouleversa son programme dès 1946, date à laquelle ses terrains furent affectés à l'implantation du groupe scolaire Victor-Hugo et des locaux du bureau de Bienfaisance, eux-mêmes délogés de la place Victor-Hugo du fait de l'installation du nouvel hôtel des postes.
De plus, sa construction ne put commencer avant la libération des terrains. La démolition de l'ancienne prison commença en 1948. En novembre 1952, en vue de la construction de l'école maternelle, on entreprit également la destruction du fragment de remparts. Inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, son intérêt ne justifia pas un classement aux yeux de la commission supérieure des monuments historiques. La ville se vit seulement imposer de conserver les deux tours situées aux extrémités de ce mur dans leur intégrité. Une seule de ces tours fut néanmoins conservée. Le percement des rues des Remparts et Trouessard nécessitèrent enfin les expropriations de sept immeubles qui furent entreprises entre octobre 1946 et décembre 1952, et furent suivies de leurs démolitions.
Vue aérienne en 1955.Les chantiers des écoles s'étalèrent sur la décennie 1950. La construction de l'école primaire commença en avril 1952 et elle ouvrit deux ans plus tard. L'école maternelle ne fut pas mise en chantier avant la fin des années cinquante et ouvrit donc probablement au début des années soixante.
Les logements de la rue des Remparts, qui furent attribués en priorité lors du remembrement aux propriétaires expropriés du quartier, furent édifiés sur les plans des architectes Amiot, Marc Paget, Paul Robert-Houdin et Henri Jeannin. La clôture des opérations de remembrement de l'îlot B fut prononcée par arrêté du ministre de la construction du 2 juillet 1962.
L'aménagement du quartier intégra également celui d'une jonction entre les rues Beauvoir et des Cordeliers au niveau de la tour Beauvoir. Dans son projet de 1943, Louis Arretche avait prévu la création d'une petite place au pied de la tour. Dans la seconde moitié des années cinquante, l'architecte André Aubert conçut des espaces verts afin d'accompagner de façon heureuse les nouvelles constructions scolaires, la Tour Beauvoir et les anciennes constructions aveugles bordant la rue des Cordeliers qui séparaient auparavant les propriétés riveraines de la prison. Cette harmonie fut notamment recherchée dans le choix d'une pierre apparente de Pontijou laissée brute de carrière, en tous points semblable aux murs de soutènement des écoles.
Au terme de ces travaux, la perspective Denis-Papin qui avait été le principal objectif d'origine ne fut pas achevée. Cela aurait en effet nécessité d'autres démolitions d'immeubles intacts, et ce sans avantage pour la circulation, la voie étant interrompue par les escaliers monumentaux. Tout au plus aurait-elle pu être une perspective visuelle. En revanche, du fait des percements des rue Trouessard et des Cordeliers, le secteur est encore aujourd'hui un nœud de circulation très fréquenté.