Géographie et géologie
Néons-sur-Creuse sur la carte de Cassini vers 1765. (Archives départementales de l'Indre).La commune de Néons (1985 ha) couvre une portion de l'interfluve séparant la Creuse (à l’est) et la Gartempe (à l’ouest). Elle est au contact des départements de la Vienne (Angles-sur-l'Anglin et Vicq-sur-Gartempe) et de l'Indre-et-Loire (Yzeures-sur-Creuse et Tournon-Saint-Pierre).
Sa géomorphologie rappelle la transition sud-nord de la géologie locale. Elle compte quatre ensembles. Le tiers sud de Néons offre un paysage ouvert de plateau calcaire jurassique (calcaire à mollusques) typique du pays dit blancois. L'encaissement de la rivière Creuse, limite orientale de la commune, s'estompe assez rapidement passées les hauteurs du Soudun et de Groue. Les falaises perdent progressivement de leur majesté et disparaissent complètement pour faire place à une plaine alluviale bordée de versants peu accusés. La partie nord-est est ainsi occupée par des terrains alluviaux issus d'anciennes terrasses de la Creuse. Elle s'apparente à un glacis tourné vers l'est et le nord-est. Le bourg et plusieurs hameaux de Néons-sur-Creuse (Mallet, Roches, Thais) sont implantés sur ces terrasses. Au sud d'une faille géologique traversant les bois de la Pennerie, dans le secteur de la Bonnelière, les calcaires du Jurassique sont recouverts d’une formation détritique constituée par des épandages sableux, d’argiles à galets et de limons de plateau. Des calcaires du Crétacé (essentiellement des tuffeaux blancs à Inoceramus) s’étendent dans le nord-est de Néons-sur-Creuse, marquant l'entrée dans la Touraine géologique.
Le paysage n'est ici pas dépourvu de relief comme en témoignent les hauts de coteaux, en dômes, à la Rairie, à la Grève, à Monteboeuf et à la Chardonnière, point culminant de la commune (133 m NGF). Leurs sommets sont par ailleurs recouverts de lambeaux remaniés du complexe détritique de l’Éocène (Ère tertiaire) associés à des limons de plateaux. Ils offrent une vue surplombante sur le dernier ensemble paysager : la vallée de la Gartempe "indrienne" où la rivière est accompagnée en rive droite d'une large terrasse.
Archéologie
Des indices, souvent erratiques, témoignent de la fréquentation humaine au Paléolithique tels les outils en silex ramassés au Plessis, à la Bonnelière, au Soudun, à la Charbonnière ou à la Chardonnière. Par ailleurs, un abri sous roche (non daté) est connu dans les falaises de la Groue. Aux abords de la Gartempe, près du hameau de Champagne, des fouilles pratiquées à la faveur d'extensions successives d’une carrière de sables et de graviers ont mis au jour des traces d’occupation datant du Néolithique (Moyen) dont deux sépultures à inhumations (Sécheresse, Jean 2019 ; Benarrous 2012).
Durant l’Antiquité, le territoire communal de Néons est inclus à la cité des Pictons (Poitou antique). Espace frontalier, il est en contact des cités des Turons (Touraine), au nord, et des Bituriges (Berry), à l’est de la Creuse. En 1967, des fouilles conduites dans le centre du bourg de Néons (place de l’église et anciens jardins du presbytère) ont mis au jour les fondations d'un bâtiment gallo-romain sur lesquelles un espace funéraire s’est développé au cours du Moyen Age, peut-être dès le début du haut Moyen Age (un épais couvercle de sarcophage trapézoïdal est toujours visible en bordure de la place des Marronniers). Des fragments de mosaïque et de la céramique ont également été découverts près de l’église. Cet habitat gallo-romain présumé pourrait être le point d’origine du développement médiéval du bourg de Néons-sur-Creuse.
La présence gallo-romaine est attestée dans plusieurs autres endroits de la commune (secteurs de la Bonnelière, de la Camusseterie, de la Petite Couture, du port de Néons, etc.). Près de l’écart de Champagne, une villa antique du Haut-Empire (avec plan partiel de la pars urbana) est également connue (Provost et al. 1992 ; Coulon 2001 ; Benarrous 2012). D’assez nombreux témoins de la sidérurgie ancienne (pour certains antiques) ont été inventoriés dans la commune. Il s’agit de dépôts de scories de réduction du fer et de traces de bas-fourneaux (à la Bonnelière, aux Essarts, à la Coudre, etc.).
Le Moyen Age est surtout documenté par les résultats des fouilles préventives conduites en bordure de la Gartempe, aux Cognées, où un habitat rural occupé du 6e à la 1ère moitié du 10e siècle a été mis au jour (Jesset 2008). Toujours près de Champagne, les textes signalent l’existence d’un prieuré, la Serpontière ou Serpouillère, qui dépendait de l’abbaye de Saint-Cyran (Saint-Michel-en-Brenne). Il a vraisemblablement disparu à la fin de l’Ancien Régime (Norel 2005, Benarrous 2012, Plaux 2013). Dans le bourg, hormis le cimetière paroissial, les chroniques de Saint-Vincent rapportent que “on a trouvé des sarcophages et poteries à la croix du Haut Bourg, dans lesquelles se trouvait du liquide” (Sécheresse 2019).
Histoire
La maison forte de La Bonnelière depuis le sud-est.Le territoire de Néons-sur-Creuse, se trouve au Moyen Age dans la même situation géographique qu’au cours de l’Antiquité c’est à dire à la frontière des grandes provinces du Poitou, du Berry et de la Touraine (et diocèses associés). Picton, donc, durant l’Antiquité, il reste tourné tant au spirituel qu’au temporel vers le Poitou jusqu’à la fin de l’Ancien Régime. La paroisse Saint-Vincent de Néons, connue dès le 13e siècle, appartient, jusqu’en 1801, au diocèse de Poitiers tandis que les fiefs locaux (Néons, Issoudun-sur-Creuse, la Bonnelière, le Plessis, la Rairie, Thais) relèvent, presque tous du Poitou (directement de la baronnie d’Angles). Inclus au pays coutumier de Poitou, Néons était, à la fin du 17e et au 18e siècle, en “pays redimés des gabelles". Ses limites septentrionales et orientales, matérialisées par le cours de la Creuse, sont alors au contact de “pays de grande gabelle” comme la Touraine et le Berry. Aussi les écarts de Thais et de Mallet auraient accueilli des postes douaniers surveillant le trafic clandestin de sel : les “maisons de Gabelous”.
Le château de Néons-sur-Creuse, depuis le sud-est.
Le château de Néons, installé dans le bourg, est attesté au plus tard à la fin du 14e siècle : en 1371, il est repris par les Français aux Anglais (Bascher 1991 ; Boué 1992).
Vue du château (donjon) de Soudun, depuis le nord-est. Le fief d’Issoudun-sur-Creuse, avait son siège au Soudun (Exodum cité en 1210-1211 ; Archives départementales de l'Indre, F1208). Son château est pris en 1369 par les Anglais (Bascher 1991). L’édifice actuel, construit dans les années 1920 dans l’esprit Viollet-Leduc, n’a que peu à voir avec l’ancienne résidence seigneuriale. Signalons qu’Armand Jean du Plessis, cardinal de Richelieu, tirerait son patronyme du fief néonnais du Plessis, dans le sud de la commune.
Clocher-porche de l'église de Néons, carte postale vers 1930. (Archives départementales de l'Indre, 48 J 4 B 6920).L’église Saint-Vincent est citée pour la première fois en 1211 (ecclesia S.Vincentii de Noum ; Archives départementales de l'Indre, F1208). La superficie de la paroisse Saint-Vincent de Néons a évolué au début du 19e siècle. Elle s’étend, jusqu’en 1813, au delà de l’actuel territoire communal de Néons, tout particulièrement dans une enclave couvrant le tiers ouest de celui de Lurais (690 ha entre Fournioux et le cours de l’Anglin) (Plaux 2013). Son vocable (saint Vincent, patron des vignerons) paraît rappeler, au Moyen Age central, l’existence de cultures de vignes, certainement assez importantes, installées sur les coteaux de la vallée de la Creuse. Au 13e siècle, les vins du val de Creuse étaient appréciés des cours d’Angleterre et de France (Plaux s.d.).
Au début du 19e siècle, Néons-sur-Creuse est la plus agricole des communes du Pays tournonnais : les agriculteurs et ouvriers agricoles représentent alors 90% de la population de la commune pour 10,5% d’artisans et de boutiquiers (Plaux 2013). Le pic démographique de la commune (dans ses limites actuelles) est atteint en 1851 avec 903 habitants (Poitou 1997). Au 19e siècle, la vigne représente encore 10% des cultures à Néons mais le phyloxera détruisit la quasi-totalité des vignobles avant la fin du siècle. Il existait deux moulins sur le cours de la Creuse disparus dans la seconde moitié du 18e siècle : celui de Néons (situé non loin du Port de Néons) et celui du Soudun (près du lieu-dit Pué à Tournon-Saint-Martin) (Plaux s.d. ; Benarrous 2012).
Le passeur assurant la traversée de la Creuse entre Launay et Néons. (Lerat 2002, p.79).La communication avec la rive droite de la Creuse était assurée au 19e siècle par des passeurs au moyen de bateaux entre le Port de Néons et les Baudessous (Tournon-Saint-Pierre) ainsi que depuis Mallet (Champ du bateau) vers Tournon-Saint-Martin. La construction du pont de Tournon, en 1847, et de la route départementale 6 rendent progressivement obsolètes ces anciens bacs de la Creuse. L’évolution du réseau routier contribue, tout particulièrement au 20e siècle, au développement du bâti dans le secteur du Petit-Roche : lotissements des Grouts et habitations le long de la D6/le Chaillet.
Néons compte 403 habitants en 2013.
Patrimoine bâti
232 dossiers individuels d’œuvres architecturales ont été enregistrés parmi lesquels 67 portent sur des maisons et 122 sur les fermes. Les 45 autres dossiers concernent les édifices religieux et publics (église, mairie, écoles, cimetière), le commerce, le génie civil (pont sur la Creuse), l’artisanat et les édicules divers (croix, puits, fontaines, etc.). Bien que la majorité des oeuvres inventoriées soit attribuée à l’Époque contemporaine, on compte quelques édifices datant ou pouvant dater de la fin du Moyen Age et de l’Époque moderne.
Le bâti de Néons se compose essentiellement de maisons (principalement dans le bourg et les principaux écarts très développés) et de fermes (regroupées en écart ou isolées). Le bourg de Néons et les principaux écarts (Mallet, Thais, Champagne) sont installés sur des terrasses alluvionnaires non loin des cours d’eau (Creuse et Gartempe). Parmi les écarts de moindre importance citons le Petit-Roche, Monteboeuf, Choré, la Carlière, la Bessardière ou la Lochetterie (aujourd’hui quasiment incluse au bourg).