Statue de Jacques Coeur exposée à Bourges.
L’opération d'inventaire général du patrimoine culturel portant sur la statuaire et les monuments publics en région Centre-Val de Loire pour la période 1800-1950 a permis de définir un corpus de 259 œuvres étudiées : 171 monuments commémoratifs ou décoratifs et 18 fontaines situés dans l’espace public (places, parcs et jardins, voies de circulation) ou anciennement situés, certains éléments ayant été mis à l'abri en musée par mesure de sauvegarde, auxquels s’ajoutent 70 oeuvres apparentées conservées dans les musées de la région. En effet, une importante composante de cette étude est la richesse des collections des musées relatives à la statuaire publique. La collaboration avec les dix-neuf établissements régionaux concernés a permis de mettre en rapport esquisses, maquettes, moulages… avec les œuvres exposées dans l’espace public. Une vingtaine de monuments ou fontaines n'a pas été étudiée en raison de leur disparition ou de l'absence de documentation les concernant.
Le catalogue exclut les monuments aux morts, très nombreux et majoritairement de série, ainsi que les monuments des cimetières qui, bien que constituant des espaces publics, contiennent essentiellement des monuments privés. Les obélisques, expression la plus simple du monument - défini comme un ouvrage d'architecture ou de sculpture destiné à perpétuer un souvenir - ont été intégrés dans l’étude (Colonne Marceau à Chartres, fontaine Lebon à Bourges et monument élevé en hommage aux aéronautes Sivel et Crocé-Spinelli à Ciron), de même que les fontaines publiques dès lors qu’elles présentaient un décor réalisé par un sculpteur ou un ornemaniste. Les fontaines en fonte de fer commandées sur catalogue ont également été prises en compte, car elles proviennent, pour plusieurs d’entre elles, de la fonderie Ducel implantée sur le territoire régional, à Pocé-sur-Cisse (Indre-et-Loire).
Le département le plus pourvu en statues et monuments publics est le Loiret (51) suivi par l'Indre-et-Loire (35) avec les deux villes-phares attendues : Orléans (25) et Tours (18). La ville de Bourges totalise les deux-tiers des œuvres réalisées dans le Cher (18) ; le département le moins bien doté est l'Indre (16). La dissémination de villes moyennes dans la région a permis une répartition assez générale du phénomène pour la période envisagée : Dreux (12 monuments), Blois (8), Montargis (7), Chartres (6), Amboise, Châteauroux, Saint-Amand-Montrond et Nogent-le-Rotrou (5 pour chacune d'elles).
Le monument le plus ancien connu est la Colonne Marceau déjà citée, élevée le 14 juillet 1800 en hommage aux morts des guerres révolutionnaires ; le dernier monument original (hors répliques modernes), le buste de Gaston Couté (1880-1911) exposé à Meung-sur-Loire, ville dont il est originaire, date de 1949.
Chef de clan africain et fillette agitant une palme (fontes modernes). Pendant l'Occupation, les bronzes d'une vingtaine de monuments sont enlevés et fondus dans le cadre de la réquisition au titre des métaux non ferreux. Ces oeuvres, généralement moulées avant leur remise à l'Occupant, seront parfois remplacées, généralement après la guerre, par des copies en pierre ou en bronze, tels le buste du gouverneur général de l'Afrique-Occidentale française, Noël Ballay, et les deux statues d'Africains de son monument élevé à Chartres en 1904 et nouvellement fondus en 1948 (ci-contre).
Les monuments commémoratifs honorent principalement des personnalités nationales au rayonnement incontestable dans différents domaines, et des célébrités locales : militaire (Vercingétorix, général Marceau, maréchal de Rochambeau, Jeanne d'Arc, Louis Bourdaloue, Noël Ballay, André Boillot...), politique (Louis XI, Jacques Coeur, amiral de Coligny, cardinal de Richelieu,...), savant (Descartes, Louis Pasteur, Denis Papin,...), femme ou homme de lettres (Jean de Meung, Rabelais, George Sand, Balzac, Colardeau, Collin d'Harleville,...).
Sans surprise et se détachant nettement, les monuments dédiés à Jeanne d'Arc en chef militaire se rencontrent une quinzaine de fois dans la région. Les artistes de la Renaissance ont aussi largement inspiré les commanditaires : Jehan Fouquet et Léonard de Vinci à Amboise, Michel Colombe à Tours, Pierre Ronsard à Tours et Vendôme, Rémy Belleau à Nogent-le-Rotrou, François Rabelais à Chinon et Tours. Les deux statues qui célèbrent ce dernier, bien que contemporaines, sont de conception opposée : la première figure l'écrivain en docteur en médecine, coiffé du bonnet à houppe et assis nonchalamment dans un fauteuil posé sur un imposant piédestal orné de bas-reliefs ; la seconde le représente plus sobrement, en curé de Meudon et en pied, vêtu de la soutane et coiffé d'une calotte sur un piédestal dépouillé.
Dans le domaine de la statuaire décorative, dans laquelle ont été inclus quelques vases monumentaux, en particulier les vases exposés dans le jardin public des Prés Fichaux à Bourges, on retrouve les sujets iconographiques fréquemment traités : allégories (Harmonies de la forêt de Georges Récipon, Éternellle Tourmente de Vital-Coulhon, Le Printemps d'Albert Chartier...), figures et scènes mythologiques (Diane surprise de Jules Blanchard, Faune de Maurice Maignan, Thésée et le Minoraure de François Sicard...), scènes plus intimes (Les Mystères douloureux de Camille Alaphilippe, Le Premier Toit de Maxime Real del Sarte...), personnages issus de la paysannerie et du monde du travail (Berger allongé d'Ernest Nivet, Grand Paysan d'Aimé-Jules Dalou dont plusieurs exemplaires sont connus dans la région...).
La Source humaine exposée à Orléans.
Au sein du corpus des fontaines, outre les réalisations de qualité en fonte de fer, la majestueuse fontaine monumentale intitulée La Source humaine de Félix Charpentier (1914-1922), au parc Pasteur d'Orléans, se distingue par son volume et la puissance de sa construction.