La chapelle Saint-Jean-l’Évangéliste dite de la Funéraria (édifice autrefois à usage funéraire) fait partie d'un ensemble monumental entourant la cathédrale gothique de Perpignan.
Suite à une campagne de restauration générale de la chapelle de la Funéraria (fin XIVe siècle) menée par l’architecte en chef des Monuments historiques Régis Martin, et suite à une nouvelle affectation (lieu d’exposition d’art contemporain), la municipalité a souhaité que l’ensemble des baies de l'édifice soit fermé par une série de vitraux neufs dans le cadre de la commande publique. En 1996, l’artiste américaine Shirley Jaffe (1923-2016) est retenue par la Délégation des Arts Plastiques (ministère de la Culture), en accord avec la ville, pour présenter ce projet. Cependant, devant "l’absence d’expérience en matière de vitraux" de l’artiste et "l’importance des aplats colorés que comportaient les cartons préparatoires", il est décidé d’exécuter un vitrail d’essai pour juger du rendu définitif dans l’édifice.
Dès janvier 1997, une note informe le directeur du Patrimoine (François Barré) que c’est le maître-verrier Jean Mauret qui est pressenti par le maître d’ouvrage (Drac Languedoc Roussillon) et par Shirley Jaffe pour la réalisation des vitraux de la chapelle. Jean Mauret rédige un devis en mars suivant pour la confection d’un vitrail d’essai pour la travée gauche de la baie d’axe. D’après Bernard Voinchet, inspecteur général des Monuments historiques, la présentation in situ de ce vitrail le 14 mai 1997 "est plutôt convaincante. Ce maître-verrier, lui aussi artiste peintre, a fort bien su transposer l’œuvre : la verrière tient parfaitement la fenêtre, la vibration des verres est très habilement poussée pour que les grands aplats indiqués sur les cartons transforment la lumière et la fassent chanter, la distribution et la qualité des blancs évitent de créer des trous dans les baies, ce qui est en pareil cas est l’écueil à éviter : enfin l’aspect extérieur du vitrail est tout à fait satisfaisant". (…) "A mon sens, le seul point négatif concerne le traitement de la jonction verrière-remplage. En effet au niveau des verres foncés, l’effet de contre-jour entraîne une confusion entre pierre et verre si bien que la géométrie architecturale de la fenêtre est perturbée. Pour porter remède à ce problème, l’utilisation d’un très léger filet semblerait suffisante". Cette dernière proposition n’a pas été acceptée par Shirley Jaffe.
Fin juin, Jean Mauret propose un devis pour la réalisation des neuf verrières de la chapelle (au total 35,20 m²) à partir des maquettes de Shirley Jaffe. Il précise dans ce document les différentes étapes de son travail à venir : "agrandissement photographique des maquettes à l’échelle 1, recherche de la mise en plomb à partir de l’agrandissement, report sur calque et sur papier, découpe des calibres, assemblage, recherche des verres avec l’artiste, coloration, visites de l’artiste à l’atelier, coupe des verres, emploi de verres antiques plaqués compris toutes fabrications spéciales et voyages à la verrerie, gravure à l’acide fluorhydrique sur verres plaqués, travail de peinture et cuisson des verres, sertissage provisoire pour présentation sur verrière, sertissage définitif, masticage".
Dans un courrier daté du 1er septembre, Olivier Poisson (inspecteur général des Monuments historiques) informe le conservateur régional des Monuments historiques qu’il donne un avis favorable au projet de vitraux de Shirley Jaffe qui lui "paraît tout à fait susceptible de s’intégrer à l’architecture du XIVe de la chapelle par la variété des couleurs, par l’ensemble de son graphisme et par l’échelle des éléments. Le panneau d’essai présenté montre en outre une grande subtilité et un haut degré technique dans la réalisation".
Le projet est ensuite soumis à l’avis de la Commission supérieure des Monuments historiques le 8 septembre 1997 : il est adopté lors de cette séance. L’appel d’offre pour la confection des verrières suivant les esquisses de Shirley Jaffe est lancé à la fin de l’année 1997, et remporté par Jean Mauret.
Pendant la réalisation des vitraux (avril 1998 à juillet 1999), Shirley Jaffe se déplace à de nombreuses reprises à l’atelier de Saint-Hilaire-en-Lignières pour des séances de travail avec le verrier : le 4 avril 1997 (pour le vitrail d’essai), les 11 et 12 mai 1998, le 15 juin 1998, les 8, 27, 28 et 29 juillet 1998, le 30 août 1998, le 7 décembre 1998, le 20 janvier 1999, le 26 février 1999, le 2 avril 1999, le 27 avril 1999 et le 15 juin 1999. Durant ces rencontres, Jean Mauret choisit de "travailler en même temps sur l’ensemble des baies plutôt que d’en terminer une ou deux avant de commencer les autres". Cette option a été, selon lui, "positive malgré les appréhensions de Shirley Jaffe. Cela a en effet permis d’entrer dans le programme dans son entier et d’avancer certes à un rythme plus lent dans la réalisation mais avec une approche globale. L’expérience sur un élément de vitrail pouvant ainsi nous éclairer pour une autre baie en cours".
Les vitraux sont inaugurés le 15 juin 1999. Deux expositions accompagnent la mise en place des nouvelles verrières : au Palais des Congrès de Perpignan, où sont présentées les esquisses et les maquettes des vitraux et au Musée d’Art Moderne de Céret (Pyrénées-Orientales), où sont exposées une cinquantaine d’œuvres de Shirley Jaffe.