Le lotissement Juder est implanté dans un secteur périphérique de la ville, à la limite de la commune de Saint-Jean-de-Braye, sur une ancienne propriété arborée située rue du Faubourg-Bourgogne. Il constitue le seul exemple connu à Orléans de lotissement d'une ancienne propriété close incluant une maison et des dépendances et demeure aujourd'hui fortement enclavé.
L'appellation de la voie, allée du Clos-Vert, apparaît révélatrice des intentions des frères Juder. Les termes "impasse" ou "voie privée" sont ici remplacés par le terme "allée" qui renvoie autant à la voie de desserte du lotissement enclavé qu'à la voie plantée d'arbres appréciée des promeneurs.
Maison, 3 allée du Clos-Vert.Les parcelles sont assez vastes, si l'on excepte celles qui ont été subdivisées, et mesurent de 700 à 1400 m². Elles se rapprochent ainsi de celles observées dans d'autres opérations menées à la même période dans des secteurs très éloignés du centre, tel que le lotissement des Montées et Coursimault au sud de la Loire, où les prix bon marché permettent d'acquérir des surfaces plus généreuses. Si la clôture réalisée au n° 3, constituée d'un muret, d'une barrière et de barreaux en bois peut être contemporaine de la maison bâtie vers 1930 (image ci-contre), les parcelles bâties au cours de la première moitié du 20e siècle ne semblent pas avoir été clôturées avant les années 1950. Plusieurs motifs se réfèrent ainsi aux modèles diffusés durant cette période, parmi lesquels les cadres cintrés grillagés (au n° 11, ici avec une pergola) et le motif de dents de scie (n° 13). Côté rue, l'espace semi-public est également marqué par la présence de garages construits au fond de l'allée dans les années 1930 (n° 28-30), tandis qu'au n° 24, c'est une construction de moellons terminée par un auvent et couverte d'une terrasse qui signale l'entrée de la propriété. En l'absence de clôture, les plantations d'alignement, arbres et parterres, devaient ainsi à l'origine marquer la limite entre l'espace partagé de l'allée et le jardin privé.
Villa, 22 allée du Clos-Vert, vue depuis la Loire.L'implantation en retrait et en rangée discontinue permet de supposer l'existence d'une servitude de reculement qui devait être inscrite dans le cahier des charges du lotissement ou le contrat de vente (non connus). En effet, les premières maisons du lotissement (n° 3, 6, 11 à 15) observent un retrait égal à 10 m de l'axe médian de l'allée (6 m pour la clôture), soit exactement la même distance que dans le lotissement Coursimault autorisé en 1925. La situation apparaît différente dans la partie sud du lotissement où les édifices ont recherché les attraits du bord de Loire et sont implantées le long du chemin de halage. On remarquera ici la présence d'accès directs sur le chemin et la relation qui s'établit entre certaines propriétés et le fleuve par le jeu des ouvertures sur l'extérieur, en particulier le balcon triangulaire de la villa des années 1930 (n° 22, image ci-contre) ou le prolongement en arrondi de la terrasse de la maison de la fin des années 1940 (n° 24).
Cabanon, 10 allée du Clos-Vert.Si dans l'entre-deux-guerres, peu d'habitants ont établi leur résidence au "Clos-Vert" (seules six maisons sont bâties d'après le plan de la ville dressé en 1934), en revanche, certains propriétaires ont aménagé leur terrain en jardin ou en verger. Deux petits cabanons conservés au n° 10 et 14 témoignent en effet de cette première occupation saisonnière et/ou dominicale (image ci-contre). Ces deux cabanons sont identiques et sont construits en matériau léger pour les gouttereaux, en poutres de béton armé pour les pignons, ces derniers portant une charpente en bois couverte de tôle ondulée. Au n°10, cette petite construction était associée à un potager et un verger, vraisemblablement anciens, délimités par une allée centrale plantée d'arbustes et dont il reste quelques vestiges. Dès lors, le lotissement Juder est à rapprocher du lotissement des Montées qui connaît une évolution similaire en raison de sa situation extrêmement périphérique au moment de sa création.
Maisons jumelées, 13-15 allée du Clos-Vert.Du fait de l'étalement des constructions, des années 1920 à nos jours, le bâti demeure assez hétérogène : maison en rez-de-chaussée couverte à deux pans, villa (n° 22), pavillon (n° 3, à deux garages accolés). La maison de ville à trois travées et un étage carré (n° 4), plutôt caractéristique d'un tissu urbain dense où l'alignement et la mitoyenneté sont de rigueur, fait ici exception. D'une manière générale, les maisons possèdent un grand volume, en élévation ou par la surface au sol, qu'elles soient construites individuellement ou jumelées (n° 13-15, image ci-contre ; et n° 19-19 bis). L'individualisation a été recherchée dans plusieurs maisons par l'articulation des plans (relation intérieur/extérieur, décrochements), les décors de briques (arcs, bandeaux, angles) ou le moellon à tête redressée laissé apparent.