Ce dossier présente les moyens de l'étude menée sur le patrimoine de la ville d'Amboise, dans le cadre de la thèse de Doctorat de Lucie Gaugain soutenue en mai 2011, ainsi que toutes les sources historiques consultées.
I - Contexte de l’étude d'inventaire sur le patrimoine de la ville et du château d'Amboise aux 15e et 16e siècles
A - Contexte institutionnel
Le château, le pavillon Penthièvre, la tour des Minimes au fond.
A partir de 2006, la Région Centre-Val de Loire a mis en place un dispositif de bourse doctorale pour les étudiants commençant une thèse de 3e cycle de l’université, en partenariat avec le service de l’inventaire général du patrimoine culturel. L’étude du château et de la ville d’Amboise, initiée en partenariat avec l’université François Rabelais de Tours, est la première à avoir bénéficié de ce dispositif. Le sujet de l’étude a été défini par le directeur de thèse, en l’occurrence Monsieur Alain Salamagne, professeur d’histoire de l’art à l’université de Tours et par Monsieur Christian Trézin, conservateur du patrimoine, chef du service régional d’inventaire. Lucie Gaugain a accepté de réaliser sa thèse dans ces conditions.
Allouée pour 3 ans, la bourse doctorale permet au doctorant :
- de mener à bien ses travaux de recherche et d’aboutir à la soutenance de la thèse
- de bénéficier de l’appui scientifique du service de l’inventaire général du patrimoine culturel de la région Centre : échanges avec les chercheurs, mise à disposition de la bibliothèque et du fonds documentaire, réalisation de clichés par des photographes professionnels, réalisation ou aide à la réalisation de relevés par la géomètre-topographe du service...
- de publier en fin d'étude tous les dossiers réalisés sur le portail de données du service Patrimoine et Inventaire de la Région Centre-Val de Loire (https://patrimoine.regioncentre.fr/gertrude-diffusion/)
En contrepartie, le doctorant s’engage à apprendre la méthodologie propre à l’Inventaire général du patrimoine culturel et à fournir les résultats de son étude sous la forme de dossiers normalisés intégrables dans le système de diffusion des données régional.
B - Contexte scientifique
L’objectif premier de la thèse était de renouveler les travaux antérieurs en plaçant l’étude à la rencontre de plusieurs disciplines. Les connaissances relatives au château ont été confrontées à celles de la ville afin d’aborder le sujet sous un jour nouveau. L’étude du château, fondée sur des documents d’archives revus in extenso ainsi que sur les relevés topographiques et planimétriques a conduit à des conclusions inédites en particulier sur la fortification de la place mais aussi sur le château de Louis XI toujours resté dans l’ombre de celui de Charles VIII. La compréhension globale du château et son évolution à travers les siècles ont autorisé à formuler de nouvelles hypothèses sur le chantier de Charles VIII et sur la distribution des bâtiments.
L’étude du bâti urbain s’est basée sur une lecture minutieuse des archives communales qui a permis de restituer un ensemble d’éléments aujourd’hui disparus, tant défensifs qu’édilitaires, tels que l’enceinte médiévale, les ponts et la maison de ville. L’architecture civile privée s’est heurtée à diverses difficultés en l’absence de travaux antérieurs dans ce domaine ; elle a toutefois abouti à la compréhension d’un ensemble cohérent et encore vierge d’investigations.
Commencée en 2006, l’étude du château et de la ville a été conduite pendant 3 ans. La soutenance de la thèse a eu lieu en mai 2011.
La Loire, le château et la tour des Minimes depuis la tour Garçonnet.La thèse a fait l’objet d’une publication : « Amboise, un château dans la ville » par Lucie Gaugain, co-éditée par les Presses universitaires François-Rabelais et les Presses universitaires de Rennes, dans la collection « Renaissance » en 20141.
Par ailleurs, un Itinéraire du patrimoine « Amboise, ville royale : maisons et hôtels des XVe et XVIe siècles » a été publié en 2010, pour présenter les édifices remarquables et le château d'Amboise au grand public.2
Les dossiers d’inventaire ont été réalisés par Lucie Gaugain entre 2008 et 2011.
En 2018-2019, le logiciel ayant évolué, ils sont revus et mis en forme par Marie-Amélie Guichard, afin d'être publiés sur le portail du service Patrimoine et Inventaire (https://patrimoine.regioncentre.fr/gertrude-diffusion/).
C - Limites chronologiques de l’opération
Les limites chronologiques scientifiques de l’étude ont été posées entre 1421 et 1525 : c'est-à-dire peu avant la date à laquelle la ville est confisquée à la famille d'Amboise par Charles VII, en 1434 (règne de Charles VII : 1422-1461) et devient ville royale, et le départ de la cour du roi François Ier, en 1525 (1515-1547).
À la lecture des publications, l'essentiel des faits historiques et des phases de construction du château comme de la ville transparaissent. Les études se sont affinées au cours du dernier tiers du XXe siècle et les erreurs des premiers auteurs ont été corrigées par leurs successeurs. Cependant, l'approfondissement du sujet a conduit les chercheurs à se spécialiser sur la ville ou sur le château. Une étude globale de l'architecture n'avait encore jamais été entreprise, en particulier pour la ville où le service de l'Inventaire n'avait dressé qu'un inventaire iconographique. Le château quant à lui n'avait été étudié ni pour les périodes antérieures à Charles VIII ni pour les périodes postérieures à celui-ci, et en aucune manière d'un point de vue topographique, un aspect pourtant essentiel. En somme, pour la ville comme pour le château, une étude de terrain avec relevés à l'appui s'imposait. Cette nouvelle perspective a été abordée en reconsidérant l'ensemble des sources, afin d'établir le lien entre la réalité du terrain et les données archivistiques.
D - Organisation des dossiers
Les résultats sont restitués sous la forme de dossiers géolocalisés et illustrés. Pour cette étude, 208 dossiers d'édifices ont été publiés, et 18 dossiers d'objets mobiliers.
Ils sont liés à 1514 images, dont 1200 photographies réalisées par les photographes du service Patrimoine et Inventaire de la Région Centre-Val de Loire.
Organisation des dossiers de l'étude sur la ville et le château d'Amboise.
Les dossiers sont de plusieurs types :
- Le dossier Présentation de l’aire d’étude décrit les principales caractéristiques morphologiques, géographiques et historiques du territoire étudié.
- Le dossier collectif décrit les caractéristiques d’une famille d’œuvres (l'habitat par exemple).
- Les dossiers d’œuvre individuelle (architecture ou mobilier) décrivent précisément un édifice ou un objet, sous la forme d’une petite monographie.
Pour cette étude, les dossiers sont organisés autour du dossier Ville d'Amboise, puis structurés par secteurs urbains. Au sein de ces secteurs urbains, les dossiers des édifices étudiés sont classés dans des dossiers "rues".
Le dossier Château d'Amboise , lié directement à la ville, possède de nombreux sous-dossiers :
- les différents bâtiments du château : Bâtiment sur Loire, Logis de Charles VIII sur les jardins, Logis de Charles VIII sur les jardins, Logis de Charles VIII sur les jardins,
- l'enceinte castrale, qui regroupe tous les dossiers concernant les fortifications (Tour Heurtault, Tour des Minimes, Tour Garçonnet, Porte des Lions, Tour ruinée et corps de garde de la porte des Lions, Belvédères, etc...),
- la chapelle Saint-Hubert,
- le jardin,
- la rampe d'accès,
- la cour du pansage.
Les édifices détruits du château (Logis dit de Louis XI, Logis ouest, Logis des sept vertus, Logis dit d'Henri II, Ensemble canonial, Bâtiments de la basse-cour) ont été liés différemment au dossier château, afin d’apparaître ensemble : ils possèdent tous le terme "(détruit)" dans leur titre.
Quelques édifices d'importance ont par ailleurs été reliés directement au dossier ville d'Amboise (le Château, le Manoir du Clos-Lucé, le Logis des Pages, l'Hôtel Morin, l'Hôtel Joyeuse...). Les voies navigables ont été rattachées au dossier présentation du patrimoine de la ville.
II - Le corpus des sources concernant le château
A - L'iconographie
La documentation figurée (950 documents recensés) concernant le château d'Amboise peut être classée en trois catégories : les relevés d'architecture, les vues en perspective dessinées, peintes ou gravées, et les photographies.
Les relevés d'architecture
Les sources iconographiques les plus anciennes sont les représentations de Jacques Androuet du Cerceau. L'exactitude de ses « Vues » est variable mais, d'une manière générale, les dessins conservés à Londres sont plus précis et moins schématisés que les gravures. Même si les proportions des bâtiments les uns par rapport aux autres sont rarement respectées, la considération de ces relevés est toutefois indispensable car ils constituent la seule source figurant l'ensemble des logis du château issus des campagnes de construction des XVe et XVIe siècles.
Château d'Amboise, plan de 1708. (Archives nationales, O² 1903).Des plans du château ont été levés lors des travaux de restauration régulièrement envisagés au cours des siècles mais rarement effectués avant les destructions du début du XIXe siècle. Du premier plan qui remonte à 1708 existe plusieurs versions. On connaît mal les circonstances dans lesquelles cette série de plans a été réalisée, mais ils sont attribués à l'agence de l'architecte Robert de Cotte (1656-1735) qui rédigea par ailleurs un devis de réparation en 1708. Le plan de 1708 des Archives nationales est un support essentiel. Il s'agit d'un plan à rabats sur lequel apparaissent les niveaux principaux de chacun des bâtiments. Des oublis ont été commis et quelques erreurs apparaissent car, si les dimensions des constructions sont justes, l'orientation des édifices les uns par rapport aux autres est erronée.
Au 19e siècle, les relevés du château se multiplient en prévision des travaux d'aménagements et de restaurations des lieux. Le premier est le plan masse de Jean-Bernard Jacquemin, géomètre, qui lève un plan légendé du château le 20 juin 1807 en vue des travaux de Roger Ducos. Le plan, contemporain du projet de restructuration, présente les bâtiments déjà détruits et ceux à détruire (les bâtiments à raser apparaissent en brun délavé tandis que ceux qui seront réaménagés pour le sénateur sont en noir). Les appellations que l'on retrouve dans les procès-verbaux de démolition de 1806 et 1808 sont reprises en légende. En 1815, l'entretien du château revient à la ville ; durant les Cent Jours, Napoléon et son ministre de la Guerre, Louis Nicolas d'Avout (1770-1823), dit Davout, souhaitent faire d'Amboise un dépôt d'armes et de munitions. Un plan du château est à nouveau levé avec une justesse étonnante mais en raison de la nouvelle destination de l'ouvrage, on privilégia la représentation des caves troglodytiques creusées dans le promontoire rocheux et des ouvrages avancés à l'est du promontoire, du côté du coteau. En 1861, un plan du château d'Amboise et de ses abords est relevé en vue d'un aménagement des jardins et de l'édification d'un tombeau pour la famille Abd el-Kader, dont certains membres sont décédés durant le séjour de l'émir (1848-1852). Les données de ce plan qui concernent principalement les abords du château apportent des informations secondaires.
Relevés avant restauration de la tour Garçonnet côté nord-ouest en 1892, par Ruprich-Robert.Vient ensuite le temps des travaux de restaurations du service des Monuments historiques sous la direction des architectes Victor Ruprich-Robert (1820-1887) et de son fils Gabriel qui ont laissé de nombreux relevés : au total 280 documents, réalisés à partir des années 1872 consignent les états avant restauration, les différents projets de restauration et l'état restauré. Au vu de la pauvreté des rapports concernant les observations des architectes ou leurs projets, il semble qu'ils aient privilégiés les relevés à la rédaction de rapports.
La tour Garçonnet a fait l'objet de relevés très précis qui sont regroupés sur une planche aquarellée de 1892 particulièrement précieux pour appréhender l'édifice et d'une série de dessins de calepinage. Sans ces documents, la reconstitution de l'édifice, jusqu'à maintenant ignorée, n'aurait pas été possible. On notera toutefois l'article rédigé en 2011 par Évelyne Thomas3 qui propose une lecture de l'édifice différente de celle de cette étude. À cette même époque, le dégagement du pied du rempart qui menaçait ruine est entrepris et un plan du château intitulé « Achat de maisons aux pieds du rempart » répertorie l'ensemble des parcelles de terrain qu'il était nécessaire d'acquérir.
Les vues en perspective dessinées, peintes ou gravées
Vue cavalière du château, 1579, par Androuet du Cerceau.
La première vue de la ville et du château d'Amboise est celle attribuée à Léonard de Vinci (1452-1519) ou Francesco Melzi (c.1491-1570), saisie depuis le Clos-Lucé, au début du 16e siècle.
Les « Vues » de Jacques Androuet du Cerceau datent des années 1579 : malgré la beauté et la crédibilité de ces dessins, il est nécessaire de garder à l'esprit qu'il ne s'agit pas à proprement parler de relevés, et qu'ils ne sont pas exempts d'une interprétation de leur auteur.
Vue de la ville d'Amboise (...), 1762, par Lenfant.Aux 17e et 18e siècles, les dessins de plusieurs peintres et dessinateurs hollandais, comme Lambert Doomer (1624-1700) représentent la Loire à Amboise avec le château en arrière-plan. Un grand nombre de gravures exécutées après cette date s'en inspirent largement. La plus intéressante et la plus précise est la « Troisieme vüe du château d'Amboise », dessinée sur le rocher ou esplanade sur lequel le château est situé. On ne voit plus ici qu'un reste de magnificence gothique de cette ancienne maison. Une seconde gravure, légendée « Autre vüe du château royal d'Amboise du costé des champs », soit côté ville, ne respecte ni la topographie ni les proportions des monuments. Une troisième gravure, « Vüe du château royal d'Amboise », qui figure le front nord sur la Loire, est intéressante pour son esquisse de la troisième tour cavalière qui apparaît à l'angle nord-est du promontoire, au bout du jardin. En 1762, Pierre Lenfant, répondant à la commande du duc de Choiseul, alors propriétaire du château, exécuta deux vues panoramiques. Réalisés avec une précision saisissante, les bâtiments du château s'y observent bien, notamment l'église Saint-Florentin et le logis de Louis XI, encore debout à cette date.
De très nombreuses gravures du XIXe siècle, pour la plupart conservée au Cabinet des estampes de la Bibliothèque nationale de France, représentent essentiellement le front nord du château face à la Loire beaucoup d'entre elles figurent également dans les collections de la Bibliothèque municipale de Tours. Trois vues font toutefois exception : celle d'Eugène Brion, de 1795, qui nous présente le logis des Sept Vertus sous un angle inhabituel. Une autre gravure, conservée à la Bibliothèque municipale de Tours, présente la Porte des Lions depuis l'intérieur de l'enceinte du château. Enfin, un dessin à la mine de plomb figure le front sud du château, côté ville, alors en cours de destruction.
Les photographies
Les premières photographies du château d'Amboise datent des années 1870-1875 et sont juste antérieures au début des travaux de restaurations. La plupart offre des vues panoramiques, soit depuis l'île d'Or sur le rempart nord du château, le logis du roi et la tour des Minimes, soit à partir de la ville, sur la chapelle et parfois une partie du rempart sud. Sans doute par manque de recul, la tour Heurtault est très rarement photographiée.
Vue d'ensemble de la ville vers le nord. Photographie Henrard, 1955. Les vingt-trois clichés de Frédéric Lesueur, conservés aux Archives départementales de Loir-et-Cher, constituent une source fondamentale de la fin du XIXe siècle. Une autre série d'une cinquantaine de photographies, dont la plupart ne sont pas datées, s'avère néanmoins capitale, en particulier pour connaître l'état de la Grande Salle avant restauration. Ces clichés pris au cours des travaux de restaurations sont consultables sur la base de données Mémoire4 (https://www.pop.culture.gouv.fr/). Par ailleurs, la Fondation Saint-Louis a acquis au moment de l'étude une collection de petites photographies des années 1925 figurant les ouvriers à l'ouvrage qui complète les collections précédentes et qui est conservée au château. La photothèque de la Médiathèque du Patrimoine et de l'architecture conserve une grande partie de contretypes de ces clichés. Un recueil plus tardif, contemporain de la Seconde Guerre mondiale, atteste les dommages alors subis par le château et de nombreux bâtiments avaient dû être étayés à la suite de ces dommages. Enfin, le fond Henrard, constitué dans les années 1960, rassemble des vues en partie aériennes de la ville et du château.
B - Les sources textuelles
La totalité des sources repérées a été dépouillée et celles déjà publiées vérifiées. Sur 6 000 folios analysés, près de la moitié ont été transcrits. Nous avons intégré un certain nombre de sources supplémentaires aux études précédentes, tels que les comptes de l'argenterie depuis Louis XI et Charlotte de Savoie jusqu'au début du règne de François Ier. Parmi les documents inédits exhumés, citons une quittance conservée par la Bibliothèque de l'Armée à Vincennes, ainsi que plusieurs mentions de paiements de maître d'ouvrage sous Louis XI. Concernant les sources non publiées mais qui avaient déjà été consultées par les historiens d'Amboise et dont la transcription intégrale a été faite pour l'étude, les procès-verbaux d'états des lieux dressés entre 1623 et 1632 et en 1761 fournissent des descriptions qui viennent éclairer la compréhension des plans anciens du château. Les procès-verbaux de démolition du château, datés de 1806 et 1808, renseignent quant à eux sur l'état de conservation des bâtiments à cette date.
Le compte de construction du château de 1495-1496, conservé au château d'Amboise par la Fondation Saint-Louis, avait été publié très partiellement par Louis de Grandmaison qui a retracé l'histoire de ce document : lors de l'incendie révolutionnaire de l'église Saint-Florentin du château, les autres volumes conservés à la bibliothèque du chapitre disparurent et le chanoine Henri Edme Joseph Quirit de Coulaine ne put sauver que celui-ci. Ce compte, tenu par Alixandre Blandin, constituait en fait le quatrième de la série, et demeure le seul conservé. Il compte 285 folios de parchemin rédigés recto-verso, à la plume, pourvus d'une couverture d'aies de bois couvertes de vélin ; l'état de conservation du document est excellent et la lecture en est aisée. Il a également fait l'objet d'une transcription exhaustive.
Le travail se déroulant en régie et non par « prix-fait » pour la très grande majorité des corps de métier, il est possible de suivre les quantités de matériaux employés et la répartition des tâches. Cependant, le document recèle peu d'informations sur les différents lieux d'intervention. Aussi avons-nous pris le parti de le transcrire intégralement afin d'établir, d'une part, le tableau comparatif des quatre trimestres (rôles) qui permet de comprendre l'organisation saisonnière du chantier et l'avancement des travaux, et, d'autre part, de dresser la prosopographie des gens de métier travaillant aux chantiers de la ville et du château.
Les archives relatives aux restaurations du château conservées à la médiathèque du Patrimoine ont été intégralement et minutieusement consultées. Elles apportent des éléments essentiels quant à la connaissance des techniques employées pour la restauration. Digne élève de Simon-Claude Constant-Dufeu, Victor Ruprich-Robert, succédant à Eugène Viollet-le-Duc, puis son fils, Gabriel, réinterprètent le monument qui était alors destiné à accueillir l'asile pour vieillards des serviteurs de la maison de France. L'usage du bâtiment ne devait pas transparaître dans leur projet et l'objectif était d'achever le chantier de Charles VIII. Si leurs choix et leurs réflexions ne sont jamais explicitement exposés dans les archives, on constate que la grande salle retrouve son volume initiale, que la façade sur Loire est unifiée d'une manière qui n'a jamais existé et que la tour des Minimes est coiffée d'un double couronnement assez fantaisiste. L'enluminure de la fin du XVe siècle des « Chroniques d'Amboise 5» semble constituer le seul modèle dont les architectes s'inspirèrent.
III - Le corpus des sources concernant la ville
A - L'iconographie
Le cadastre dit napoléonien établi en 1808-1810 a été le premier support de travail de Lucie Gaugain. A l'Inventaire iconographique de Valérie Mauret-Cribellier6 , l'auteur de cette étude a ajouté les plans d'alignements de la ville de 1834 et de 1890 qui constituent une source essentielle pour la compréhension de l'évolution et des transformations urbaines, qui s'accélérèrent à cette époque. La lecture de ces plans, plus celui du quartier compris entre la rue Rabelais, la rue Manuel et la place Saint-Denis, permet de retrouver, en partie, la trame urbaine médiévale.
Les informations relatives à la fin du Moyen Âge sont rares la majorité des documents datent du XIXe siècle. Sur les vues gravées ou dessinées, la ville n'apparaît jamais comme le sujet principal, qui est toujours le château. Cette iconographie s'est révélée néanmoins indispensable à l'étude de l'évolution du pont et des rives de la Loire. Le relevé du pont à la fin du XVIIe siècle extrait de l'album de Poitevin constitue par ailleurs une source indispensable. Les dessins hollandais du XVIIe siècle sont également incontournables et l'un d'entre eux n'avait encore jamais été considéré pour l'étude d'Amboise. Trois documents de la fin du XIXe siècle font toutefois exception : le relevé du logis des Sages et de ses peintures, le dessin à la mine de la porte de l'église Notre-Dame-et-Saint-Florentin-en-Grèves et le dessin à la mine de maisons à pan de bois à Amboise.
Photographie ancienne de l'hôtel Morin.
La photographie a été un support de travail capital ; outre celles déjà citées pour le château sur lesquelles la ville figure également, d'autres, très anciennes, apparaissent dans l'ouvrage de 1897 de l'abbé Bosseboeuf. Les clichés pris lors de l'élaboration du Casier archéologique dans les années 1960, dans lequel une trentaine d'édifices fut répertoriée en vue d'une protection Monument Historique, montrent des façades encore vierges de toute restauration. Enfin, les clichés photographiques consultables sur la base Mémoire7 (https://www.pop.culture.gouv.fr/) témoignent de l'état avant restauration de certains édifices, tels les églises Saint-Denis et Saint-Florentin, l'hôtel Morin (ou ancien hôtel de ville), la tour de l'Horloge ou encore l'hôtel Joyeuse.
B - Les archives communales
Conservées à la mairie d'Amboise, ces dernières ont fait l'objet d'une convention de partenariat entre le Centre d'Études Supérieures de la Renaissance de Tours et la ville pour numériser les comptes depuis l'année 1421 jusqu'en 1525, ainsi que les délibérations du conseil de ville de cette époque, et quelques chartes et privilèges d'exemption. Pendant son étude, Lucie Gaugain a également procédé à la numérisation des quittances et mandements relevant de la même période qui, étant attachés sous forme de liasses, nécessitaient une prise de vue manuelle pour chaque document. Ces archives représentent près de 5 000 folios et la transcription intégrale d'un tel volume n'aurait pu être effectuée dans le temps qui nous était imparti. Aussi avons-nous choisi de les transcrire sous forme de tableau en faisant apparaître pour la partie « receptes » les informations concernant les impôts fonciers dus à la ville et, pour la partie « despences », l'auteur du compte, le nom et le métier de la personne rémunérée, la date à laquelle elle travaille, la tâche qu'elle effectue et la somme qu'elle reçoit.
La plupart des frais de la ville concernent l'entretien des ponts, de l'enceinte et la construction d'édifices publics. Leur étude nous a permis d'appréhender, en premier lieu, l'organisation des chantiers, qui se déroulent pour la plupart en régie, et en second lieu la typologie des fortifications et des ponts de la ville à la fin du Moyen Âge, dont les vestiges ont quasiment tous disparus, à l'exception des tours de l'Horloge et Féalen et des églises Saint-Florentin et Saint-Denis. Enfin, l'exploitation systématique de cette documentation permet de compléter la prosopographie amboisienne concernant les métiers du bâtiment.